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REGARDEZ. Rallonger ses lèvres vaginales pour plus de plaisir?

En Afrique, certaines pratiques sexuelles persistent malgré l'évolution des sociétés. L’une d’elle est l’étirement des petites lèvres vaginales.


«J’aimerais bien vivre avec une fille qui a fait le Gukuna», souhaite Eugène, Rwandais d’une trentaine d’années. Malgré son ton nuancé, Eugène veut tout de même rencontrer une fille d’origine rwandaise qui est passée par là.
Le Gukuna (lire Goukouna) est une pratique traditionnelle observée au Rwanda. Elle consiste, pour les filles, à étirer les petites lèvres vaginales pour les rallonger.
Cette pratique initiatique se comprend comme une préparation de la jeune fille à sa vie de femme adulte et à sa sexualité dans le couple.
C’est aussi un moyen de socialisation pour les filles qui sont intégrées parmi les grandes personnes qui leurs en parlent. Par le Gukuna, la fille développe ses petites lèvres qui au final débordent la fente de la vulve.
«Les lèvres rallongées deviennent comme des oreilles, une sorte de couverture au dessus de l’appareil génital », explique Jeanne. «C’était perçu comme une sorte de parure intime, une sorte de rideaux pour voiler la porte d’entrée».
Une conception qui persiste encore aujourd’hui auprès de certaines personnes.

Gukuna, tradition rwandaise

Il y a quelques années, cette tradition avait la côte.
Pour les femmes de l’époque, être passé par le Gukuna augmentait les chances de rencontrer ou de plaire à un homme, d’autant plus que les hommes appréciaient les femmes au chapeau vulvaire.
«Aujourd’hui, il y a de moins en moins de filles qui le font, alors qu’il y a quelques années passées, cela se faisait plus souvent et naturellement. Au Rwanda, certaines filles des campagnes continuent à le faire, mais, discrètement. En ville, la pratique du Gukuna recule», déplore François, qui apprécie les filles aux grosses et longues lèvres.
Il arrivait aussi qu’un homme puisse poser des problèmes à sa belle-famille et à sa femme si elle n’a pas les petites lèvres développées, signe extérieur de maturité sexuelle.
Un travail de longue haleine tout de même pour en arriver à ce résultat. L’étirement des petites lèvres commence avant que la fille ne puisse voir ses premières menstruations. C’est ainsi que certaines filles y sont initiées autour de l’âge de 12 ou 13 ans pour éviter qu’elles ne souffrent davantage si cela se fait à l’âge adulte.
Au début de cette pratique, «il y a tout de même une douleur», précise François. «Mais, comme cela commence tôt, les filles avaient le temps de s’habituer à le faire aussi souvent et à avoir des lèvres bien en évidence à temps».
C’est de fait une préparation de la fille à ce qu’il convient d’appeler pudiquement responsabilité conjugale, la sexualité.
A la différence des mutilations sexuelles où une partie du corps est coupée pour inhiber le plaisir sexuel féminin, le Gukuna, cherche à le développer.
«C’est ainsi que malgré la douleur, la femme supporte parce qu’elle sait le bien qu’elle va en tirer dans son intimité sexuelle», confie une dame.

Nombreuses idées reçues

Beaucoup d’idées reçues circulent aussi autour du Gukuna, même si elles ne sont pas toujours éprouvées.
L’une d’elles est liée à la jouissance sexuelle réciproque dans le couple.
«Pendant l’acte sexuel, le Gukuna procure plus de plaisir, à l’homme et à la femme. Parce que, ce ne sont pas seulement les petites lèvres qui sont rallongées, mais, aussi le clitoris. C’est ainsi que la femme jouit facilement. Comme ses longues lèvres couvrent la verge de l’homme, elle lui procure aussi plus de plaisir en même temps», explique François, tout sourire.
Un avis que nuance Eugène.
«J’ai l’impression que le plaisir que l’on ressent entre une fille qui a fait le Gukuna et celle qui ne l’a pas fait est pareil. Mais, psychologiquement, je crois que celle qui l’a fait, procure plus de plaisir, parce que ses longues lèvres gardent plus longtemps le contact sur l’homme.»
Ces petites lèvres bien rallongées  peuvent atteindre la longueur de l’index ou du majeur dans certains cas.
Les arguments en faveur du rallongement des lèvres vaginales ne manquent pas.
«En plus du plaisir que cela procure, on dit que pendant l’accouchement, cette parure est comme une couverture sur la tête de l’enfant lorsqu’il vient au monde», avance Eugène. «Aussi, les filles qui l’ont fait, mouillent mieux que celles qui ne l’ont pas fait. Donc, on risque de se blesser pendant l’acte sexuel».
Mélissa (le prénom a été modifié) n’est pas de cet avis. Elle estime que le tout dépend d’une personne à l’autre.
«Certains hommes au Rwanda par exemple, aiment les filles qui sont passées par le Gukuna et qui mouillent trop comme un robinet ou une fontaine. Mais, les congolais aiment les filles qui ne sont pas passées par le Gukuna et qui sont moins humides», nuance-t-elle.
Et pour avoir chacun des états, humide ou sec, les filles font preuves d’imaginations. «Certaines mangent les bananes pour être plus humides, et celles qui en veulent moins recourent aux arachides. Mais, je ne crois pas que cela a vraiment une grande importance», se convainc Mélissa, qui a autour d’elle des filles qui recourent à ces diverses pratiques.

Changement des mentalités

Le Gukuna était perçu autre fois comme un signe de fierté familiale et féminine. «Avant on se moquait des filles qui n’avaient pas les lèvres débordantes», se souvient Jeanne.
«Aujourd’hui, la tendance change. On se moque plutôt des filles qui ont des telles choses». Autres temps, autres mœurs.
Malgré tout, certaines filles continuent à le faire «pour plaire aux hommes qu’elles rencontreront, s’ils en sont friands», raconte Mélissa, qui n’apprécie pas forcément le Gukuna.
«Je peux le faire un peu seulement. Ça me paraît joli lorsqu’il y a un peu de volume sur les petites lèvres. Pas trop. Si ça devient énorme, cela dérange parfois quand on porte le pantalon, surtout en tissu. Ça gène!»

Le Gukuna à la congolaise

Cette pratique n’est pas seulement observée au Rwanda.
Dans certaines villes de la République Démocratique du Congo, l’on recourt aussi à la modification de la taille des petites lèvres vaginales. Toujours presque avec la même conception d’initier des filles à leur vie de future épouse où l’acte sexuel revêt une grande importance.
Dans la province du Kasaï par exemple, c’est autour de l’âge de 11 ou 12 ans que les filles commençaient cette initiation, assurée souvent par les grand-mères. Comme les filles se mariaient tôt, il fallait qu’elles apprennent comment se comporter une fois qu’elles seront femmes, observe Angélique.
A Goma, dans la province du Nord-Kivu, les filles s’adonnent aussi à cette pratique, connue sous le nom de Misuti.
Dans cette région à l’Est de la RDC, par précaution, certaines filles préfèrent avoir quant même un début de développement des petites lèvres que pas du tout. «C’est au cas où tu tombes sur un homme qui aime ça», prévient Jeanne.
Mais, cette pratique du rallongement des lèvres souffre de plus en plus de sa perception archaïque.
«Ce sont des choses qu’on faisait au village. Aujourd’hui, je ne peux pas le faire ou le recommander à mes filles. Je veux qu’elles soient naturelles, affirme Angélique, mère de six filles. Je n’encourage pas cette pratique, parce que parfois, dès que cela devient trop long, certaines femmes veulent les couper pour raccourcir. Pourquoi alors les avoir allongées?»
«Je préfère que mes enfants restent naturels, au lieu de se rallonger. Ou comme je vois certaines filles d’aujourd’hui se percer les lèvres pour porter des bijoux.»

Mode opératoire

Pour parvenir à rallonger les petites lèvres vulvaires, plusieurs moyens sont utilisés. Certaines filles préfèrent l'huile de vache.
«Chaque soir après la douche, avec cette huile entre les mains et les doigts, tu prends les deux lèvres et commence à les rallonger tout doucement. Au fur et a mesure que les jours passent elles se rallongent», détaille Mélissa. Si l’on arrête avant une certaine période, les efforts risquent d’être vains et les lèvres se rétracter.
Il y a aussi des plantes que l’on trouve dans la forêt que les filles appliquent pour ramollir leurs lèvres, afin de mieux les tirer. Parfois, «ce sont les grand-mères ou les tantes qui amenaient les filles dans la brousse, où elles tiraient leurs lèvres».
Dans la province du Katanga, en RDC, par exemple, c’est une farine que l’on peut prendre dans la bouillie qui produit les mêmes effets, avec la douleur en moins.
Une chose revient tout de même, c'est que la jeune génération prend de plus en plus ses distances avec cette pratique pour des raisons esthétiques.
«Ce n’est pas souvent beau à voir, Tu as l’impression d’avoir une peau fanée qui pend par moment ou bien des grandes cloques posées sur la peau. Je déteste», tranche Jeanne, une femme qui jure ne pas transmettre cette tradition à ses enfants.
Jacques Matand’ et Ley Uwera

Source: Slateafrique.com

 


Vendredi 15 Juin 2012 - 11:22





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