La rivalité entre les ports de Lomé, Abidjan, Dakar et Tema s’affirme comme l’un des moteurs majeurs de la transformation logistique ouest-africaine. Les capacités conteneurisées reflètent cette dynamique, avec le port de Lomé qui s’est imposé comme le premier port à conteneurs de la région. Abidjan, doté du terminal TC2 inauguré en 2022, a renforcé sa position parmi les plateformes majeures. Tema a également consolidé son rôle régional, tandis que Dakar est engagé dans une expansion majeure avec le port en eau profonde de Ndayane, destiné à accroître significativement la capacité nationale. Ces investissements renforcent l’attractivité maritime de la région et intensifient la concurrence entre les plateformes.
Cette rivalité stimule la modernisation technologique et opérationnelle. Les autorités portuaires misent sur l’automatisation, le dragage de chenaux, la réduction des délais de passage et la fluidité douanière. Lomé met en avant des temps d’escale réduits pour certaines lignes, tandis qu’Abidjan a amélioré ses procédures de dédouanement grâce à des systèmes numériques unifiés. Tema s’appuie sur des équipements de dernière génération pour maintenir sa compétitivité. Dakar cherche quant à lui à repositionner sa stratégie logistique en misant sur Ndayane et sur l’intégration avec les corridors routiers et ferroviaires en développement.
Les corridors terrestres deviennent un déterminant stratégique de cette course régionale. Le corridor Abidjan–Ouagadougou continue d’absorber une part importante du trafic vers le Sahel, tandis que Lomé renforce son influence sur l’axe Lomé–Cinkassé–Niamey. Tema capte une partie du trafic destiné au Burkina Faso et au Mali, et Dakar conserve un avantage pour les flux vers le Mali grâce à une route plus directe et à des procédures bilatérales de transit. L’efficacité de ces axes joue un rôle clé pour les chargeurs, car la compétitivité portuaire dépend autant de la performance terrestre que des infrastructures à quai.
L’enjeu dépasse désormais le seul secteur maritime. La capacité d’un État à disposer d’un port performant façonne son attractivité industrielle, sa place dans les chaînes de valeur et son influence économique régionale. Les armateurs internationaux, en quête de fiabilité et de faibles coûts, concentrent leurs escales sur les plateformes les plus efficaces, ce qui crée un cercle vertueux pour les gagnants et accroît la pression sur les autres. Cette compétition redessine progressivement les flux commerciaux ouest-africains et oblige chaque pays à affiner sa stratégie logistique, à sécuriser les investissements et à renforcer la gouvernance portuaire pour rester dans la course.