Ces hommes ont rendu moins sympathique le régime du Président Wade.


Karim Wade, Doudou Wade, Lamine Faye, Farba Senghor et Mouhamadou Lamine Massaly ont un point en commun : ils ont rendu moins sympathique le régime du Président Wade.
Après cuisante sa défaite, le Président Wade s’est fendu d’une confession intime révélatrice. «Le peuple a cru au projet de dévolution monarchique et cela nous a beaucoup desservis», consent-il à reconnaître enfin. Mais trop tard. Macky Sall, le candidat de la coalition «Bennoo Bokk Yaakaar» avait déjà fini hier de mettre à nu les miasmes qui ont empêché le corps de cette grosse machine à gagner libéral de carburer. Surtout que des hommes-clés du président de la République sortant ont fini de se mettre une bonne partie du peuple à dos.
Le premier d’entre tous est le fils Wade, Karim, qui porte l’énorme pancarte du ministre du «Ciel et de la Terre» sur son dos, sans se gêner. Un autre qui ne s’est jamais gêné de faire montre d’une arrogance, c’est le Président du Groupe parlementaire libéral, Doudou Wade, symbole d’une suffisance dans le verbe, Lamine Faye, le petit-fils, s’est permis également quelques écarts. Mais dans la manie à verser dans l’excès de zèle, l’élément «hors du commun», Farba Senghor, et Mouhamadou Lamine Massaly n’ont pas leur pareil… Ces hommes-là, Wade les a traînés comme des boulets…
Karim Wade – La crise liée aux chantiers de Thiès emporte l’ancien Premier ministre Idrissa Seck, qui tombe en disgrâce. Macky Sall le remplace. Mais, en vieux renard de la politique, le Président de la République sort de son bonnet son fils biologique Karim Wade, qu’il avait caché à ses côtés, pour lui confier la colossale Agence pour l’organisation de la conférence islamique (Anoci). Karim multiplie sorties publiques, drague en coulisses les médias et fait sa communication. Peu avant d’accueillir la Conférence islamique, son père l’encense publiquement. «Je dirais à ta mère que tu as bien travaillé.» Après le Sommet qui s’est tenu à Dakar en mars 2008 et qui a englouti 144 milliards de FCfa, selon le journaliste-écrivain Abdou Latif Coulibaly. Karim est investi, le 23 mars 2009, sur la liste du président du Sénat et maire sortant, Pape Diop. Il se voyait bien lui succéder à la tête de la capitale et par la suite, remplacer son père à la Présidence. Mais son plan secret est démantelé par la presse. Karim Wade et les libéraux perdent la mairie de Dakar. L’avertissement du peuple n’a pas suffi. Le 1er mai 2009, Karim Wade entre dans le gouvernement du Sénégal comme ministre d’État, ministre de la Coopération internationale, de l’Aménagement du territoire, des Transports aériens et des Infrastructures. En quelques mois, son père lui dresse un tapis rouge de lauriers. «Mon fils est le plus compétent de mes ministres», juge le père Wade. Le peuple trinque à cause des délestages continus… Karim Wade est encore pointé du doigt. Il invente le «Plan Takaal» d’un coût d’environ 600 milliards de FCfa. Le 23 juin 2011, le Président Wade force les portes de l’Assemblée nationale pour imposer un ticket présidentiel où son fils va hériter d’un beau rôle. La rue sénégalaise se rebelle. Wade recule, mais n’abdique pas. Le Président Abdoulaye Wade force un troisième mandat à la tête du pays pour ensuite laisser le pouvoir à son fils Karim. Les Sénégalais le sanctionnent et il perd piteusement les élections au second tour, face à son ancien Premier ministre, Macky Sall. «Wade a été perdu par son amour filial», analyse Alioune Tine, coordonnateur du M23, qui a longtemps combattu la dévolution monarchique. Aujourd’hui, Wade-père risque d’emporter son fils Karim…mais aussi son neveu.
Doudou Wade – C’était le bras armé, la voix de Me Wade à l’Assemblée nationale. Doudou Wade, président du groupe parlementaire libéral, n’a jamais manqué l’occasion d’imposer son arrogance, de fomenter des coups bas pour ceux qui ne dansent pas la même musique que le chef d’orchestre du Palais. C’est lui qui a travaillé au corps le député Sada Ndiaye pour déboulonner Macky Sall de son bunker de président de l’Assemblée nationale, en votant une motion de destitution, après la convocation faite par Karim de s’expliquer sur le financement de l’Anoci. Sous son regard perçant, son visage en couteau, se cache un homme qui aime les joutes verbales et les bagarres célèbres dans l’Hémicycle. Lors de l’agression du truculent Me El Hadj Diouf, c’est lui qui avait travaillé l’oreille du «violent» Famara Senghor pour faire la fête à l’avocat… Auparavant, il avait giflé le jeune ministre Aliou Sow. A l’Assemblée, ses colères sont redoutées et son «cynisme» effraie. Dernièrement, il s’est attaqué bassement sur les origines ethniques du concurrent de son oncle Abdoulaye Wade… Quid du petit-fils de Wade ?
Lamine Faye – Le petit-fils et garde du corps du chef de l’Etat sortant aime paraître en mal dans les journaux people. En 2011, il s’est signalé en refusant de payer des factures cumulées estimées à 7 millions de FCfa à la Société nationale d’électricité (Senelec). L’on se rappelle encore la sortie, toutes griffes dehors, dans les colonnes de Week-end magazine de la Miss Sénégal 1987, Fabienne Feliho : «Lamine Faye est obsédé par ma personne.» Révélant qu’elle avait entretenu une relation sulfureuse avec le petit-fils du président de la République qui avait abouti à un début de grossesse. Ce guérillero marié à trois épouses fait feu de tout bois quand il s’agit de se payer appartements et villas huppés à Dakar. Alors qu’il était «calot bleu» au service de son grand-père dans les années de braise. Aux côtés du Président sortant Abdoulaye Wade, il s’est taillé un réseau de relations qu’il utilisait au gré de ses intérêts et humeurs du moment. Le 20 janvier 2010, le petit-fils et garde du corps du président de la République, Lamine Faye, est mêlé dans une affaire de fraude en Douane et recel pour avoir acheté une Porsche Cayenne volée et recherchée par Interpol en France. Sur le chapitre de la violence gratuite, il ne pourra jamais détrôner «l’élément hors du commun»…
Farba Senghor – En Italie où il a fait ces études, on aurait mentionné dans son Cv : «Elément hors du commun.» C’est unique dans l’histoire du Sénégal de trouver un ministre au parcours aussi atypique que Farba Senghor. Une posture qui devait le pousser à l’humilité, mais c’est méconnaître l’homme qui a fini d’étaler ses carences intellectuelles et morales sur les ondes des radios et les plateaux télés. Avec lui, les Sénégalais ont vivement regretté la mise et la correction des ministres de l’ancien régime. Farba Senghor a commis l’imprudence jusqu’à convoyer des nervis pour mettre à sac les locaux des journaux L’As et 24 HEURES. Alors qu’il occupait le portefeuille de ministre des Transports, obligeant Wade à le faire démissionner, car lors du procès, l’agent recruteur lâchait dans L’As : «Farba m’a abusé.» Jusqu’à présent, Farba n’est pas inquiété le moins du monde. Il se permet même de jeter des excréments sur la façade du domicile de l’ancien Premier ministre Idrissa Seck. Toujours rien. Son compère dans ce jeu de massacre qui a perdu Wade reste Mouhamadou Lamine Massaly, le patron des Jeunesses Wadistes, l’autre Baye Fall de Wade…
Mouhamadou Lamine Massaly – A la veille du second tour de l’élection présidentielle, le jeune leader des Jeunesses Wadistes, 33 ans, avait joué sa «petite» carrière politique en déclarant : «Si le président de la République perd Thiès, je mets fin à ma carrière politique.» Sous l’ère Wade, Mouhamadou Lamine Massaly a habitué les Sénégalais à tant de déclarations incendiaires et innocentes que sur ce coup de bravade de plus, beaucoup de compatriotes ont du mal à le croire. Nommé par on ne sait quelle prouesse au poste de président du Conseil d’administration de la Société des infrastructures de réparation navale (Sirn), Mouhamadou Lamine Massaly, qui n’a même pas son Baccalauréat, a été défénestré de son poste et jusque-là, il n’a pas accepté la passation de service avec son successeur. Au moment où des centaines de doctorants ont du mal à trouver leur premier emploi, le cas Massaly a choqué plus d’un jeune Sénégalais qui ne retrouve pas en lui, un bon exemple de réussite …
MOR TALLA GAYE (L’Obs)
 
 
 
 

Bamba Toure

Mercredi 28 Mars 2012 03:05

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