Audit physique et biométrique de la Fonction publique à partir du 30 novembre : 250 millions pour traquer les agents fictifs


Le ministre de la Fonction publique était on ne peut plus clair, au moment de lancer officiellement les audits des agents de l’Etat, il y a quelques semaines de cela. S’il est établi que des personnes ont bénéficié de salaires et qu’ils n’ont pas travaillé, ils leur seront délivrés des ordres d’assiettes. Et il est à croire qu’il y aura des fraudeurs arrêtés, tellement l’enquête sera exhaustive et sophistiquée.
Le gouvernement du Sénégal a décidé de concevoir et de mettre en œuvre de profonds changements dans l’Administration. Après un premier audit physique de son personnel enclenché en 1996 et un autre portant uniquement sur le corps des enseignants initié en 2006, l’Etat, par la voix de son nouveau chef, a demandé au cours du Conseil des ministres du 12 avril 2012, au gouvernement de procéder à un autre audit, cette fois-ci global, des agents de l’Etat. Ainsi, plus de 250 mil­lions de francs Cfa sont mobilisés, dans un délai raisonnable de 5 mois, pour faire l’état des lieux.
Devant démarrer officiellement le 30 novembre prochain, le rapport final des audits est en effet attendu le 30 avril 2013. A la lecture du document des termes de référence dont Le Quotidien a pu obtenir copie, les effectifs ciblés sont : les agents fonctionnaires régis par la loi n°61-33 du 15 juin 1961 portant statut général des fonctionnaires, les agents non fonctionnaires régis par le décret n°74-347 du 12 avril 1974, les agents régis par les statuts spéciaux (personnel de l’inspection général d’Etat, des douanes, des forces de police, des eaux, forêts et chasse, du chiffre, de la magistrature de l’ordre judiciaire, de la magistrature de la Cour des comptes, des parcs nationaux, des forces armées, de l’administration pénitentiaire, du service de l’hygiène). Les catégories émergentes (les professeurs contractuels de l’enseignement, les contractuels chargés de cours, les maîtres contractuels) sont également concernés par ces audits tout comme les journalistes agents de l’Etat régis par l’arrêté d’extension n°1704 du 14 février 1992. Les informaticiens régis par l’instruction n°25 du 24 avril 1980 relative au régime spécial applicable au personnel du Service informatique de l’Etat ne sont pas également en reste.
En termes de méthodologie, la mission d’au­dit sera réalisée sur la base des différentes listes connues éditées par la direction de la sol­de, des pensions et rentes viagères, la di­rection des ressources humaines, les directeurs ou chefs de service de l’administration générale et de l’équipement (Dage/Sage) des différents départements ministériels concernés et les directeurs de personnel administrant le corps relevant des statuts spéciaux. Ces listes, précise le texte, devront contenir les informations suivantes concernant les agents : prénom et nom, numéro de matricule de solde, date et lieu de naissance, sexe, structure et lieu d’affectation, corps ou catégorie, fonction, région, département et arrondissement. Bref, tous les détails devant confirmer l’existence de l’agent en question sont pris en compte, dans ces audits. Une enquête qui, au-delà du dispositif de pointage, prévoit un mé­canisme de relevé d’informations biométri­ques permettant de déceler les présences mul­tiples d’un même agent, dans différents services.
Un matériel biométrique prévu à cet effet par l’Agence de l’informatique de l’Etat (Adie) permettra de collecter toutes les informations personnelles des agents y compris leur photo numérique ainsi que les em­prein­­tes digitales.
Le ministre de la Fonction pu­blique qui a évalué la masse sa­lariale de l’Etat à 44 milliards par mois, s’est ré­cemment indigné du fait que, pendant ce temps, des mi­nistères et autres structures de l’Etat se trouvent, confrontés à un déficit de personnel. Man­sour Sy de prévenir, en marge du lancement of­ficiel des au­dits, que «s’il est établit que des per­sonnes ont bénéficié de sa­laires et qu’ils n’ont pas travaillé, ils leur seront délivrés des ordres d’assiettes.» En plus de ces coupables de fraude, leurs supérieurs hiérarchiques directes seront également mis en cause et de­vront eux aussi, recevoir des or­dres d’assiettes. Mieux, ils feront l’objet d’une traduction devant de Conseil de discipline.

Moussa Sarr

Lundi 19 Novembre 2012 13:32

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