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Sheikh Sidia Bayo, opposant gambien: «Yaya Jammeh cherche à se racheter une conduite»


Sheikh Sidia Bayo, opposant gambien: «Yaya Jammeh cherche à se racheter une conduite»

Destination la Gambie où le président a fêté, il y a quelques jours, le 21e anniversaire de son accession au pouvoir. A cette occasion, Yaya Jammeh a pris une décision historique : l'amnistie de dizaines de condamnés à la peine capitale ou à perpétuité pour trahison. Sont aussi concernés par cette soudaine mesure de clémence, mais sous certaines conditions, des Gambiens condamnés pour meurtre et des trafiquants de cannabis. Yaya Jammeh a aussi dans la foulée libéré une douzaine de proches des participants à la tentative de coup d'Etat du 30 décembre dernier, qui étaient détenus sans jugement. Comment interpréter ces gestes du tout-puissant chef de l'Etat gambien qui a instauré un climat de peur sur son pays depuis des années ? Pour répondre à cette question Sheikh Sidia Bayo, opposant exilé en France et candidat à la prochaine élection présidentielle en 2016 est l'invité de Marie-pierre Olphand.

RFI : Qu’est-ce qui explique ce geste du président Yahya Jammeh ?

Sheikh Sidia Bayo : Il y a plusieurs raisons à cet acte politique de Jammeh. La première, c’est qu’il y a une vraie asphyxie financière du régime de Yahya Jammeh. Le pays est dans un chaos économique sans précédent. Yahya Jammeh, depuis trois ans, s’est vu suspendre plusieurs aides économiques. Par exemple, l’Union européenne depuis quelques mois a suspendu son aide économique à la Gambie.

Vous voulez dire que c’est sous la pression qu’il a décidé de changer de cap et d’amnistier certaines personnes ?

Oui, parce qu’avant même que l’Union européenne décide de suspendre son aide à la Gambie, les Etats-Unis aussi ont arrêté l’aide habituelle qu’ils donnaient à la Gambie sur son programme appelé l’Agoa [Accord de libre-échange entre les Etats-Unis et l'Afrique]. C’est tous ces évènements, toutes ces actions de ces institutions internationales, plus le lobbying de l’opposition exilée qui a payé. Aujourd’hui, on doit arrêter, en tout cas pour l’opposition gambienne, de se poser des questions : est-ce que Jammeh a été sincère ou pas ? Est-ce que c’est par rapport à la conjoncture économique du pays que Jammeh a procédé à ces libérations ? Moi, je dis non. Aujourd’hui, c’est vrai qu’il y a une raison derrière ces libérations. Sincèrement, je pense qu’il cherche à montrer patte blanche à la communauté internationale dans son intérêt propre d’abord.

Mais pourquoi se racheter une conduite aujourd’hui et pas il y a cinq ans ou il y a dix ans ?

Le pays a changé depuis la dernière élection présidentielle. Il ne faut pas oublier que la Cédéao [Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest] avait boycotté notre élection présidentielle en 2011. Il ne faut pas oublier qu’à l’heure où je vous parle, Yahya Jammeh est isolé, même au niveau de ses pairs africains. Dernièrement, la présidence de la Cédéao lui a échappé encore et a été donnée au président Mack Sall. Ça fait quand même 21 ans qu’il est au pouvoir. A chaque nouvelle présidence de nos institutions africaines, que ce soit la Cédéao ou l’Union africaine, on l’oublie volontairement. Ce qui veut dire quelque chose. Aujourd’hui, il a compris aussi qu’après le coup d’Etat de décembre 2014, il risquait de finir comme la majorité des dictateurs africains et je pense qu’il n’a pas envie de terminer comme un Mouammar Kadhafi, un Saddam Hussein ou même un Hissène Habré qui actuellement est en train d’être jugé par la chambre africaine à Dakar. C’est quelqu’un qui aime la vie, je vous parle du personnage. Il fait souvent des fêtes dans son village natal à Kanilai. Il invite les stars du monde entier pour venir faire des propagandes de son régime. Donc ce n’est pas quelqu’un qui veut terminer comme la majorité des dictateurs africains et je pense honnêtement qu’il cherche à se racheter une conduite et c’est pour cela aussi qu’il a fait un appel à l’opposition exilée de rentrer au pays et qu’il a aussi libéré ces prisonniers politiques. C’est un geste sincère de sa part.

Mais est-ce qu’on peut parler d’ouverture alors qu’il y a quelques jours, il envisageait d’allonger la liste des délits passibles de peine de mort ? Il a averti aussi que les exécutions de condamnés à mort allaient reprendre alors qu’il a quasiment de fait un moratoire depuis trois ans. Où est l’ouverture là-dedans ? Est-ce qu’il n’y a pas un paradoxe, une contradiction en tout cas au moins au minimum ?

Vous me parliez de pressions internationales. Ce qu’il faut savoir, c’est que les Américains de sources fiables et gouvernementales préparaient ce qu’on appelle « travel abroad », c’est-à-dire une sanction contre son régime, contre son entourage pour l'empêcher de se rendre aux Etats-Unis et dans la zone Schengen. A partir du moment où il a pris connaissance de ces sanctions imminentes, il a été très bien conseillé.

Donc tout s’est joué à quelques jours près ?

Exactement. Aujourd’hui, si Yahya Jammeh libère plus de 200 prisonniers politiques et appelle l’opposition à rentrer au pays, il faut le défier et aller dans son sens.

Vous êtes exilé en France. Vous seriez prêt à rentrer à Gambie ?

Moi, je prépare un retour en Gambie. C’est vrai qu’il sera conditionné par des conditions sécuritaires. Au moment de l’annonce de ma candidature à la présidentielle de 2016, j’avais demandé à Ban Ki-moon [secrétaire général de l'ONU] d’envoyer une mission d’observation sécuritaire pour sécuriser le scrutin présidentiel en novembre 2016. L’opposition doit aussi accroître les demandes de réformes électorales pour nous assurer une élection libre, transparente et surtout équitable. Pour cela, il va falloir se mettre à la table des négociations et il a ouvert une brèche avec cette libération des prisonniers politiques et l’appel à notre opposition exilée à rentrer.

Donc vous êtes tenté, mais encore méfiant ?

On a intérêt à être méfiant. Qu’on soit opposant ou même simple activiste, on ne peut pas rentrer en Gambie sur simple recommandation, sur simple appel de Yahya Jammeh. Je ne suis pas le seul dans cette position. Il y a Mai Ahmad Fatty, le secrétaire général du GMC [the Gambia Moral Congress party]. Il y a Henry Gomez qui est aux Etats-Unis aussi [le leader du Parti gambien pour la démocratie et le progrès (GPDP)]. Nous sommes trois, quatre opposants exilés qui ont mené une politique et une opposition virulente à l’égard du régime de Jammeh depuis les dernières présidentielles. Et pour que nous puissions retourner en Gambie, il nous faudra des conditions sécuritaires à la fois garanties par son régime, mais aussi accompagnées par des institutions comme l’Union africaine et l’ONU par exemple.



Dimanche 13 Mars 2016 - 09:25





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