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Indifférents, divertis, accros aux Tics... Concentration 2.0


Indifférents, divertis, accros aux Tics... Concentration 2.0

Les élèves n’aiment plus les études. Ils ne savent plus pourquoi ils sont à l’école. Selon les enseignants, les enfants ont d’autres rêves et d’autres modèles de réussite. Conséquence : ils ne font plus d’efforts et sont davantage divertis par les Tics qui sont mal utilisées.

L’élève doit être au cœur du savoir, il doit être au centre de tout. En voilà des déclarations du ministre de l’Education nationale qui font sourire les enseignants. Au fond d’eux-mêmes, certains se demandent si le ministre sait ce qu’il y a dans la tête des élèves. En effet, pendant que tous les acteurs s’activent et se battent même entre eux pour leur offrir le meilleur système possible, les apprenants eux se détournent progressivement de l’école. Un facteur explicatif de la baisse du niveau vient justement de l’attitude de l’élève. Une posture invariable, que ce soit à la maison ou en classe.

Si l’on en croit les enseignants, les élèves ont l’esprit et les yeux ailleurs. ‘’Les études ne font plus rêver’’ ; ‘’les élèves ont d’autres modèles maintenant’’ ; ‘’le temps qu’on perd à l’école est jugé trop long, comparé aux raccourcis’’. Ceci n’est qu’un échantillon de ce qui est sorti de la bouche des professeurs de Blaise Diagne. En fait, pendant longtemps, l’école était le principal tremplin pour l’ascension sociale. De nos jours, la courbe s’est inversée. Ceux qui étaient les moins considérés sont devenus les riches et surtout les stars. Par contre, les grands diplômés bardés de leurs connaissances sont devenus les derniers de la société. ‘’Le savoir ne mène à rien’’, tranche un enseignant. Pour eux, il suffit juste de faire une comparaison entre un lutteur ou une danseuse et un professeur, de quelque niveau que ce soit. Les vocations ont donc changé depuis lors.

Le CEM Scat urbam interdit les appareils au sein de l’établissement

En fait, d’après les éducateurs, les élèves vont à l’école parce qu’ils ne peuvent pas ne pas y aller. ‘’On n’apprend plus pour savoir, mais pour réussir. Or, l’école ne garantit plus la réussite. En quittant la maison, les enfants laissent derrière eux des grands frères ayant des diplômes universitaires et qui passent leur temps à préparer du thé’’, se désole-t-on. Cette rupture entre l’élève et le savoir fait que celui-ci ne participe plus à son éducation. Les technologies de l’information et de la communication (Tic) devaient être un atout considérable, mais ils se sont révélés en fin de compte comme étant des outils nuisibles à l’élève.

Tous les enseignants décrient l’usage qu’en font les élèves. ‘’Ils ont une conception réduite de Internet. Ils  n’y sont que pour des futilités’’, déplore l’un d’eux. Au lycée Blaise Diagne, par exemple, la salle informatique a été fortement fréquentée. L’administration a décidé de bloquer Facebook et Youtube. Depuis lors, elle a été désertée. ‘’Je passe tout mon temps à prier les élèves d’accorder quelques mégaoctets (Mo) de leurs passes internet aux études, mais rien. Tout ce qu’ils savent faire, c’est attendre un exposé pour aller à wikipédia et prendre le premier document qui leur tombe sous la main’’. ‘’Tout ce qui les intéresse, c’est la dernière danse de Beyoncé et le dernier but de Christiano Ronaldo’’, ajoute un autre. Pourtant, même lorsque le téléphone n’est pas connecté à Internet, il est source de distraction. C’est pourquoi au CEM Scat urbam, on interdit les appareils au sein de l’établissement. Ils sont pris et ne sont restitués qu’à la fin de l’année.

Classement du Barça : zéro faute. Dictée : zéro

Parmi les téléphones qui ont été saisis, il a été découvert qu’un élève filmait ses camarades pendant que le professeur faisait son cours. ‘’Il est évident que cet élève ne suivait pas’’, commente le Principal. Justement, ces appareils permettent également aux enseignants et aux administrations scolaires d’incriminer les parents. Ils ne comprennent pas comment un élève qui n’a pas tous les livres au programme, qui n’a jamais vu la couleur de certains d’entre eux, peut disposer d’un téléphone de luxe qui peut coûter au bas mot 50 000 F. 

En dehors des Tics, il y a aussi la conduite en classe qui prouve davantage l’aversion que les jeunes ont pour les études. Pendant le cours, les enseignants ont le sentiment qu’ils s’adressent à des statues. Aucune réaction ou presque. Sur un effectif de 60 à 70 élèves, c’est à peine si on a un groupe restreint de cinq participants et un groupe élargi qui fait 10 au maximum. Et le reste alors ? ‘’Ils ne sont là que pour accompagner les autres’’, répond Ibrahima Gnabaly d’un ton très sérieux. Dans ces conditions, les enseignants n’espèrent même pas que les élèves fassent le pas vers eux. Ce qui peut facilement déboucher sur le découragement de l’enseignant. Presque tous se disent désarmés. Et pourtant les élèves sont très intelligents quand le sujet les intéresse. Un professeur déclare avoir l’habitude de demander à ses élèves de lui faire le classement du Fc Barcelone. Ainsi, du gardien de but à l’attaquant de pointe, c’est toujours zéro faute. Tout le contraire, lorsqu’il s’agit de la dictée.

Un petit groupe comme bouée de sauvetage

Il y a quand même quelques exceptions. Des élèves très brillants et dévoués aux études. Ils participent au cours et anticipent même les leçons. La remarque faite est que, de plus en plus, ce sont les filles qui travaillent pendant que les garçons s’occupent de filles et d’autres choses. D’ailleurs, beaucoup de professeurs avouent compter sur ces quelques élèves, à chaque fois qu’ils sont inspectés. Il y a tout de même un phénomène qui peut être inquiétant. Non seulement la majorité des élèves ne participe pas, mais surtout elle a tendance à vouloir décourager la minorité. Celle-ci est caricaturée, méprisée et qualifiée de ‘’xobe’’ (terme parfois péjoratif qui veut dire jouer au sérieux à l’excès) par le reste. Une enseignante confie qu’elle se bat, tous les jours, avec un groupe de sa classe pour que la fille la plus travailleuse ne soit pas intimidée.

Face à ce cocktail, l’école n’est plus attractive ; ni pour l’élève, ni pour l’enseignant. Le premier parce que les perspectives sont sombres et le rêve ailleurs, et le second parce que sous payé et mal considéré par les pouvoirs publics.



Samedi 30 Juillet 2016 - 07:48





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