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Chez Gattuso à Colobane : Les parents du condamné dans une prison de tristesse

SETAL.NET-L’OBS – La famille de Cheikh Sidate Mané alias Gattuso a accueilli la condamnation à 20 ans de travaux forcés de leur fils comme l’annonce de son décès.


Chez Gattuso à Colobane : Les parents du condamné dans une prison de tristesse
72 heures après le prononcé de cette lourde sentence, la demeure de Fama Diop, tante de Gattuso, ne désemplit plus. La maîtresse de maison et tous les proches de Gattuso sont insatisfaits de la Justice qui s’est appuyée sur le témoignage de Arame Sow pour établir la culpabilité de leur fils, sans aucune autre preuve. Alors que le témoin aurait servi de faux témoignages en variant trois fois dans ses déclarations. La famille du condamné conteste cette condamnation qui s’est appuyée sur les allégations d’une personne pas crédible pour briser l’envol d’un jeune de 30 ans. A Colobane, il est devenu une célébrité. Non pas parce qu’il porte le nom d’un guerrier des pelouses vertes d’Italie et du monde, Gennaro Ivan Gattuso, ancien footballeur international italien. Si le nom de Cheikh Sidate Mané alias Gattuso est connu aujourd’hui, Me Abdoulaye Wade y est pour quelle chose. Au même titre que le défunt magistrat Cheikh Tidiane Diakhaté et les membres du Mouvement du 23 Juin (M23). Aujourd’hui, il est devenu tristement célèbre. Son nom a été ventilé par la presse jusqu’au plus reculé recoin du pays. Seulement, Gattuso pourrait bien se passer de cette malheureuse renommée qui a pris sa source à la suite de la mort du jeune policier Fodé Ndiaye, tué le 27 janvier 2012 après la validation, par le Conseil constitutionnel, de la troisième candidature de Me Abdoulaye Wade. Cette décision prise par les cinq Sages était aussi l’arrêt de mort du jeune policier. Dans la vague des arrestations qui ont suivi cette mort atroce, il y avait Gattuso, un cuisinier de 30 ans qui devrait rester en prison pour les 17 années à venir. Jusqu’en 2032. Une très lourde sentence décidée par la Cour d’Assises de Dakar. Vendredi 6 février 2015 était une journée presque comme les autres. Un vent glacial qui balaie la capitale dakaroise en cette période de froid. Seulement, le Ciel ne faisait pas simplement que souffler cet air frisquet sur Dakar. Il était également en train de tracer un sombre destin, un bien vilain avenir pour trois jeunes dont les noms sont sortis de la banalité. Et le destin avait chargé les magistrats de la Cour d’Assises de Dakar de le substituer pour ce jugement. Au final, 20 ans de travaux forcés ont été décidés contre les deux accusés, Cheikh Sidate Mané alias Gattuso et Cheikh Diop dit Christ. Au moment où le troisième accusé, Cheikh Cissé, bénéficiait d’une relaxe. Une décision jugée démesurée. Les proches de Gattuso sont encore sous le choc. A Colobane, il ne faut pas beaucoup d’effort pour se rendre chez Gattuso. Et le domicile a perdu de sa superbe. «Depuis l’annonce de sa condamnation, tout Colobane converge chez nous. On dirait bien un deuil», lâche la tante maternelle de Cheikh Sidate Mané, celle-là même qui a guidée les premiers pas de Gattuso. Les déclarations de la tante du cuisinier sont réelles. La maison était envahie par une forte délégation venue témoigner leur solidarité et leur soutien à la famille du condamné. Dans cette maison, tout rappelle l’affliction, le deuil jusqu’aux mines attristées et les mets préparés. Mais la maîtresse de maison, Fama Diop, est restée cette personne accueillante qui a pu dissimiler son chagrin, le temps de revenir sur les péripéties de cette condamnation «injustifiée», selon elle. La dame, d’un âge assez avancé, est entourée de sa famille. Une famille qui a encore la force d’accuser, et de remettre «en cause ce jugement qui ne s’est appuyé que sur un faux témoignage». Un retour sur ce fameux 27 janvier 2012 permet de douter aussi de cette sentence et de proclamer l’innocence de Gattuso. Que ce soit la tante de Gattuso ou Ousmane Fall, ils ont fait des témoignages qui disculpent le jeune de Colobane. «Ce jour-là, j’étais avec lui à la terrasse. Nous suivions la manifestation ensemble depuis cette terrasse. Je ne suis pas un enfant. J’ai 50 ans aujourd’hui et je suis Musulman. Je n’allais pas le défendre s’il l’avait tué. Mais il ne l’a pas assassiné. Et la famille avait cru que, devant les magistrats de la Cour d’Assises, la vérité finirait par jaillir. Mais malheureusement, ce n’est pas le cas», raconte Ousmane. C’est dans cette veine que s’inscrit le témoignage de Ndèye Guèye, voisine de la famille de Sidate trouvée chez Fama Diop. «Gattuso est un jeune sans histoire. Et depuis le prononcé de ce délibéré, on ne peut rien avaler. Et la Justice doit être outillée pour savoir qui est qui. Et si c’était le cas, elle n’allait jamais s’appuyer sur les témoignages de Arame Sow. Alors qu’elle est une personne pas crédible du tout. Il faut que les autorités judiciaires revoient ce qui s’est vraiment passé. Et il faut aussi qu’elles parlent des tortures, c’est inadmissible dans un Etat de droit. Makhaly Ndiack NDOYE Fama Diop, tante de Cheikh Sidate Mané alias Gattuso «Le témoin qui a fait condamner mon fils a servi trois versions différentes» Fama Diop, grande sœur de la mère de Cheikh Sidate Mané souffre dans sa chair. Mais elle reste digne. La condamnation de son neveu à 20 ans de travaux forcés à la suite du meurtre du policier Fodé Ndiaye l’a abattue. Ainsi que toute sa famille, d’ailleurs. La mère de famille pense que la Justice s’est trompée en se basant sur le témoignage d’une personne peu crédible. «Je suis la tante de Cheikh Sidate Mané dit Gattuso. Sa mère est ma sœur. Il a vécu ici avec sa mère depuis sa naissance. Et quand sa mère a déménagé à Hamo, à Guédiaaye, il est resté avec moi ici alors qu’il n’avait que 7 ans. Et je peux vous dire qu’il a toujours été un gosse sans problème. Il n’a jamais été arrêté avant cette affaire pour quoi que ce soit. Il est taquin et est connu de tout le monde dans le quartier. Ses seules activités se résument au football, d’où son surnom. C’est un homme bien qui a reçu une bonne éducation. Le jour de la manifestation, j’étais à Cambérène. Et quand j’ai appris que la manifestation a dégénéré, je suis rentrée aussitôt. Lorsque je suis entrée dans la maison, j’ai demandé après tout le monde, mon fils a ensuite verrouillé la porte de la maison pour empêcher les gens de sortir. A un moment donné, mon fils est venu me dire que la presse relayait l’information selon laquelle un policier a été tué. Je n’y croyais pas au départ. Mais par la suite l’information a été authentifiée par toute la presse. C’est Sidate, lui même, qui est descendu de la terrasse pour me dire que la radio avait certifié qu’un policier a été tué lors de la manifestation. Personne n’est sorti de la maison jusqu’au lendemain. Le surlendemain, tout était redevenu normal. Gattuso était même parti s’entraîner le soir, comme à son habitude. Après, il est venu chercher de l’eau à la pompe à eau qui est devant la maison. C’est là-bas qu’il a été arrêté par la police. Il a été conduit manu militari on ne sait où. Au départ, on croyait qu’il était dans les locaux de la Division des investigations criminelles (Dic). Mais il n’était pas là-bas et on ne connaissait pas où il était gardé. Le lendemain, on nous informe qu’un autre jeune du quartier aussi a été arrêté, puis d’autres jusqu’à 6 arrestations. Quand nous sommes parvenus à le voir, et de très loin, il était à la Dic, des chaînes aux poignets et aux chevilles. C’est par la suite qu’on a été mis au courant des tortures qui ont été infligées à Gattuso. Et Cheikh Cissé a eu à dire à son grand frère que les policiers-enquêteurs leur disaient qu’ils allaient venger leur collègue. Gattuso était tellement malmené qu’il pissait du sang et saignait des oreilles. Même ses parties intimes ont été coupées par endroits. C’est ainsi qu’on a contacté Me Assane Dioma Ndiaye pour se plaindre du sort qui a été réservé à Gattuso. C’est grâce à la perspicacité et au combat acharné de cet avocat que les policiers ont arrêté les tortures. Nous sommes restés ainsi jusqu’au jour où nous avons entendu dire que les accusés ont été vus dans une vidéo en train de tuer Fodé Ndiaye. Qu’en plus, la Police, après perquisition, a sorti un tissu maculé de sang chez l’un des six personnes accusées de ce meurtre. Ce qui est totalement faux. Et jusqu’à présent, personne de la famille n’a vu la vidéo. Et nous les avons même invités à nous dire dans quelle maison le tissu a été trouvé. En vain. Par la suite, le juge d’instruction a libéré trois inculpés. Il ne restait plus que les trois qui ont été jugés vendredi dernier. Mais à dire vrai, toute cette affaire s’est appuyée sur les déclarations variantes d’un témoin (Arame Sow, Ndlr). Il faut aussi savoir que Arame Sow et Cheikh Sidate ont milité à côté de Modibo Diop. Mais ils ne s’entendaient pas du tout. Il y avait une rivalité entre les deux militants. Ce qu’il faut savoir, c’est que Arame a une forte influence sur la police. Il est souvent arrivé qu’elle promette d’envoyer quelqu’un en prison. Et elle tient toujours ses promesses. Elle a même envoyé sa propre sœur au gnouf. Elle a mis du chanvre indien dans les effets de celle-ci pour l’accuser ensuite. C’est un repris de justice qui a même eu à accoucher en prison lors d’une de ses trois condamnations. C’est un repris de Justice. Et je ne crois pas que les témoignages d’une personne pareille puissent guider la Justice. Et si les jeunes sont condamnés, c’est par la faute du témoignage de celle-ci qui a varié durant toutes les étapes de la procédure. Elle a servi trois versions et aucune d’entre elles n’est vraie. Je ne peux pas ne pas faire un appel à l’encontre de Macky Sall, Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng et Youssou Ndour. Ce sont eux les organisateurs de cette manifestation qui a conduit à cette affaire. Nous sommes fatigués à cause de cette proximité avec la place de l’Obélisque. Nous ne sommes que des victimes.»




M. Nd. NDOYE l'Observateur


Lundi 9 Février 2015 - 14:50





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