Comment fête-t-on 40 ans de musique ?
Avec tous les artistes de la place. Il y aura Youssou Ndour qui est le parrain de l’évènement. Omar Pène sera sur scène, Ismaël Lô aussi. Carlou D, Didier Awadi, Maréma, Fada Freddy, Idrissa Diop, Souleymane Faye, Pape Niang. Et beaucoup d’instrumentistes. Pour quelques-uns, les invités ont déjà choisi le morceau du duo et travaillent dessus. Pour les autres, l’improvisation est une seconde-nature. La seule obligation est de fêter les 40 ans de musique et accessoirement, le trophée comme il se doit. S’il était possible d’inviter tous les artistes, je l’aurais fait. D’ailleurs, invitation ou pas, j’enjoins tout le monde à venir faire la fête avec moi.
Artiste rigoureux tout au long de votre carrière, n’appréhendez-vous de partager la scène avec la nouvelle génération. On pense à Maréma ?
Il faut déjà prouver ce que tu sais faire. Maréma est peut-être nouvellement arrivée, mais elle est talentueuse. Elle a remporté le prix Découverte Rfi. Awadi était passé par là aussi. Je pense qu’elle a sa place dans la kyrielle d’artistes invités. Elle joue de la guitare, connaît ses accords, il ne doit pas y avoir de problème pour se mettre au même niveau que nous. Et cela l’enchante !
Avec lequel des artistes invités serez-vous le plus à même d’offrir un duo inoubliable ?
J’avais déjà collaboré avec Youssou Ndour par le passé. Nous avions, après un travail de longue haleine, enregistré deux titres. Là, nous ne serons pas en studio, cela va être du direct, mais il connaît déjà les morceaux. Awadi est venu répéter, Idrissa Diop a choisi le titre sur lequel il veut chanter et nous avons eu une séance de répétition. Il faut garder en tête que malgré les duos, ce concert sera un spectacle de Cheikh Lô et ce sera à moi d’assurer.
Vous connaissez ou avez travaillé avec les artistes invités. Laquelle de ces collaborations jugez-vous capable de bluffer le public ?
On a répété avec Habib Faye sur un morceau qu’on avait conçu en 1999. La chanson s’appelle «Ndaw si» et elle est très jolie. Malheureusement ou heureusement pour nous aujourd’hui, ce morceau a été très peu joué, à cause d’un répertoire riche à l’époque. J’y ai pensé pour cet anniversaire, j’ai fait appel à Habib qui avait composé la musique avec Ibou Cissé, le claviste et on a décidé de le réactualiser. Le morceau a été bien travaillé, bien répété et il devrait faire un tabac. Je suis sûr qu’à 90 %, le public va s’y tromper et penser qu’il s’agit d’un inédit.
Ce devrait être alors la surprise de ce concert ?
Pour sûr ! Je pense que ça va faire une belle surprise.
Je n’ai plus rien à prouver
Vous êtes fier du trophée World musik exposition (Womex) obtenu en octobre 2015. Est-ce la consécration ?
J’ai eu quelques trophées en 40 ans de musique. Le premier était avec «Doxandém» en 1990 où il y avait 20 cassettes en compétitions. Le deuxième est tombé en 1997 avec «Néla thiass» qui a obtenu le Kora d’or nouveau talent africain. Mes cinq albums ont aussi successivement occupé la première place du Top Ten. Cela veut dire qu’on a longtemps hissé haut le flambeau sénégalais. Pour moi, le plus grand prix est le Womex obtenu au salon de la musique mondiale. Il y avait 200 nominés et j’ai été choisi. A noter aussi qu’en 15 ans d’existence, le Womex n’a jamais été attribué à un Africain. Je suis le premier, c’est vous dire ma fierté pour ce prix.
Sept mois après ce sacre, avez-vous l’impression que les Sénégalais ont fini par s’attribuer ce trophée ?
Je ne sais pas. Il y a des gens qui m’aiment bien et qui ont bien reçu la nouvelle. J’ai reçu des appels de mes pairs. Mais, il y a aussi les jaloux… De manière professionnelle, les réseaux sociaux ont joué le rôle véhiculaire. Je crois que le message est passé et je compte bien que les Sénégalais partagent cette joie ce soir, lors du concert anniversaire.
En 40 ans de carrière musicale, jamais vous n’avez versé dans la mode des anniversaires. Pourquoi maintenant ?
De ma vie, je n’ai jamais fêté mon entrée en musique. Pourquoi aujourd’hui ? Peut-être, est-ce le moment. Je me suis dit : «Écoute Cheikh, tu fais juste 40 bâtons de musique et tu reçois un prix à la quarantième année.» C’est peut-être tardif pour certains, mais ce n’est pas anodin pour moi. Je crois au destin et c’est arrivé au moment où cela devait arriver, malgré mes succès tout au long de ma carrière. Mes albums, je le rappelle, ont toujours été premier du Top Ten. Je ne me suis jamais reposé sur mes lauriers, mais après 4 décennies et un trophée mondial, c’était le moment où jamais.
Vous ne vous reposez pas sur vos lauriers et pourtant, on vous entend toucher le plafond avec ce prix ?
Non ! C’est juste que je me dis qu’il n’y a pas plus rien à prouver. Si j’étais dans la Fonction publique, je serais à la retraite, parce que mes 60 ans ont sonné l’an dernier. Je suis dans l’art et pour moi, la retraite, c’est la mort.
A votre âge, vous donnez-vous encore des challenges ?
Si vous deviez m’honorer d’une prière, souhaitez-moi 111 ans sans ordonnance que je puisse continuer à relever les défis de la musique.
Réalisée par AICHA FALL THIAM
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