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À PROPOS DU DÉBAT SUR LES RÉFORMES DE LA JUSTICE


À PROPOS DU DÉBAT SUR LES RÉFORMES DE LA JUSTICE
L’actualité judiciaire est marquée par un débat sur le sens et les orientations des réformes du Statut de la Magistrature et de la loi organique sur la Cour suprême. L’importance de ces deux aspects (statutaire et organique) de la justice appelle la contribution des acteurs dont l’analyse pourrait apporter des éclairages pour une meilleure appropriation de la signification et des enjeux de la nouvelle configuration projetée. Mon collègue et ami Souleymane Téliko, certainement mû par le souci d’enrichir la réflexion, exprime un point vue qu’il me permettra de ne pas partager tant en ce qui concerne le fondement que l’argumentaire. 
L’article 26 du projet de loi organique sur la Cour suprême prévoit un mandat de six ans non renouvelable pour le premier président et le procureur général de la plus haute juridiction. S’agit il d’une atteinte au principe de l’égalité des citoyens devant la loi ou d’une curiosité juridique sénégalaise totalement inconnue de toute autre organisation constitutionnelle (ou simplement juridique) de par le monde ? Assurément non,  tant du point de vue de la relativité du principe d’égalité devant de la loi (I) que de l’objectif du renforcement de l’indépendance de la justice, mère de constructions organiques fort originales (II) 
  
I- LA RELATIVITE DU PRINCIPE D’EGALITE DES CITOYENS DEVANT LA LOI 
  
Il peut paraître inconfortable pour un magistrat, dont la loi organique sur le statut lui confère le privilège de prendre sa retraite à 65 ans, là où la plupart des fonctionnaires de l’Etat finissent leur carrière à 60 ans, d’invoquer le principe de l’égalité des citoyens devant la loi pour flétrir une supposée distorsion qui conférerait une prolongation d’activité aux plus hautes autorités judiciaires. Rappelons simplement qu’au sein de l’Armée nationale, comme à l’Université, l’accession ou non à certains grades détermine le moment de jouir d’une retraite méritée. 
Devons nous considérer toutes ces situations comme des atteintes graves au principe d’égalité des citoyens devant la loi au point d’ériger en fondement du débat une question éthique ou morale ? 
La diversité des régimes juridiques applicables à différentes catégories de citoyens selon leurs niveaux de responsabilités et de grades renseigne sur les variations de l’appréciation de ce principe. Il serait fastidieux d’énumérer les différents privilèges, immunités et autres irresponsabilités qui s’attachent au statut de certaines personnalités. Les magistrats, dont l’office principal est d’appliquer la loi, ne se heurtent ils pas souvent à des obstacles de cette nature sans pour autant invoquer l’éthique et la morale ? 
  
Mon collègue et ami Téliko s’insurge contre le fait de « conférer un statut spécial à une autorité judiciaire, fût-elle le premier président de la Cour suprême ». Posons la question autrement. La Cour suprême et le magistrats qui y officient bénéficient-ils d’un traitement spécial par la loi ? La meilleure illustration vient d’un des aspects de la réforme qui porte sur la loi organique sur la Cour suprême. Il n’existe pas, à ma connaissance, de loi organique sur une Cour d’appel. Les deux plus hautes autorités judiciaires partagent un grade et une hiérarchie qu’eux deux seules détiennent. 
  
En France, pays dont le modèle juridique inspire largement notre organisation judiciaire, l’âge de la retraite des magistrats est fixé à 65 ans. Pour autant, le premier président et le procureur général près la Cour de cassation ne partent à la retraite qu’à 68 ans. Sans que cela n’influe sur le respect et la considération que leur vouent leurs collègues qui, eux, peuvent solliciter et obtenir ou pas une prolongation d’activité lorsqu’ils atteignent l’âge limite de 65 ans. 
  
Au demeurant, l’auditoriat à la Cour suprême permet aux magistrats qui y sont admis d’accéder à des échelons supérieurs dès la fin de leur séjour à la Cour, dépassant leur camarades de promotion du simple fait de ce séjour. Je n’ai pas souvenance qu’un magistrat se soit offusqué, au nom de l’éthique ou de la morale, qu’un séjour à la Cour suprême avantage en grade des collègues, tandis que d’autres, pourtant en service dans différentes juridictions restent dans une logique d’avancement classique. 
La Cour suprême cristallise la hiérarchie de la justice et trône au sommet de l’architecture judiciaire de notre pays. L’inlassable combat pour l’indépendance de la justice s’accommode mal de positions approximatives qui ne résistent pas à la réalité des faits, mais qui peuvent produire l’effet inverse en donnant l’illusion d’une justice fragile, au moment où les efforts devaient tendre vers le renforcement de l’autonomie de ceux qui incarnent, au mieux, la magistrature, le premier président et le procureur général près la Cour suprême. Une Cour suprême qui, sous d’autres cieux, pas loin de notre cher pays, emprunte aujourd’hui une configuration que nous ne connaissons pas encore et prévoit déjà ce mandat qui fait débat chez nous. 
  
II- POUR UN MECANISME GARANTISSANT L’INDEPENDANCE DE LA JUSTICE 
  
La Côte d’Ivoire vient d’adopter une nouvelle constitution dont l’un des mécanismes institutionnels rappelle l’organisation que le Madagascar s’était choisie. L’article 150 de la nouvelle constitution ivoirienne instaure une Cour suprême qui comprend en son sein une Cour de cassation et un Conseil d’Etat. Le président de la Cour suprême y est nommé pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois. En février 2016, le président de la Cour suprême du Bénin bénéficiait d’un autre mandat de cinq ans à la tête de la très haute juridiction. 
Le Sénégal rejoint ces deux pays dans une communauté de vision juridique, une perspective non pas seulement d’harmonisation, mais mieux, d’uniformisation à l’instar de l’invite des traités de la CEDEAO, de l’UEMOA et de l’UMOA qui configurent dans l’espace ouest une architecture homogène sur plusieurs matières. La capacité organisationnelle et l’innovation institutionnelle de ces pays ne semblent pas souffrir de déficit éthique et/ou moral. 
  
Dans notre pays, trois institutions incarnent les principales hautes juridictions de l’organisation judiciaire. Le président du Conseil constitutionnel exécute un mandat de six ans nonobstant son âge. Le président de la Cour des comptes, dont les décisions sont déférées devant la Cour suprême, continue d’honorer son mandat en dépit du fait qu’il ait atteint la limite d’âge de 65 ans. A ce propos, un arrêt de l’Assemblée du Conseil d’Etat français, en date du 07 juillet 1989 (Arrêt Ordonneau) précise que la fixation de la durée du mandat du président de la commission de la concurrence est une garantie d’indépendance et d’autorité. Il ajoute que la survenance de la limite d’âge d’exercice de l’activité n’influe pas sur la durée du mandat qui doit être mené à son terme. 
Dans le cas du mandat prévu par l’article 26 du projet de loi sur la Cour suprême, le choix du législateur de ne considérer que la durée sans l’assortir de la condition relative à la limite d’âge d’exercice de l’activité suffit à écarter les dispositions de l’article 65 du projet de loi sur le Statut. 
  
Comment ne pas comprendre et accepter qu’une harmonisation intervienne pour placer l’ensemble des principaux dirigeants des hautes juridictions du pays sous l’empire d’un mandat afin de garantir l’indépendance, l’autorité et la stabilité des ces institutions ? 
  
La démarche adoptée s’inscrit dans une mutation qui participe du renforcement de l’indépendance de la justice. L’évolution des critères d’appréciation du maintien au poste de premier président et de procureur général près la Cour suprême suit une courbe ascendante en conférant une meilleure assise aux personnalités judiciaires promues. Il suffit juste de veiller dans l’application à une protection renforcée pour mettre hors d’atteinte ce mandat. Incliner le débat vers une question éthique ou morale revient à restreindre la portée de la mesure et à assombrir les intentions des magistrats qui réclament un Conseil supérieur de la magistrature sous la conduite exclusive des magistrats. En quoi la conception de l’accession au poste de premier président de la Cour suprême et de procureur général près ladite Cour sous la forme d’un mandat peut elle constituer une question éthique ou une question morale seulement au Sénégal ? 
  
Il nous faut éviter dans notre manière d’aborder les débats sur la vie de nos institutions judiciaires de privilégier les approches émotionnelles et carriéristes. Il est tout aussi convenant de susciter la réflexion en interne et de recueillir toutes les positions, de délibérer en toute quiétude dans les instances appropriées de notre organisation commune, l’union des magistrat sénégalais (UMS) avant de porter les contradictions sur la place publique en utilisant les médias. Nous avons choisi d’exprimer notre avis de cette manière contraint par les positions tranchées déjà suffisamment relayées par la presse avant même la convocation de l’assemblée générale extraordinaire de l’UMS. 
  
Osons espérer que la sérénité des échanges, la pertinence de l’argumentaire et le souci de renforcement de l’indépendance de la justice prévalent dans les esprits et dans les discours au plus grand bénéfice de l’Etat de droit. 
  
  
CHEIKH M. BAMBA NIANG 
MAGISTRAT


Samedi 26 Novembre 2016 - 08:23





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